jeudi 15 septembre 2022

 

Merci pour votre fidélité,

le blog Yatra s'arrête


autre chose naîtra peut-être !


Depuis longtems j'ai perdu connoissance ;
Dans un gouffre je me vis abîmer ;
Je ne puis plus supporter la science ;
Heureux mon cœur, si tu sais bien aimer.



Perdu, plongé dans des eaux ténébreuses,
Je ne vois rien, et je ne veux rien voir ;
Mes ténèbres sont des nuits amoureuses ;
Je ne connois mon bien ni mon espoir.



Dans ce profond d'amour inexplicable,
On m'élève bien au-dessus de moi ;
C'est un nuage obscur, invariable,
Où l'âme ne voit qu'une sombre foi.



C'est un brouillard plus clair que la lumière ;
Je ne puis exprimer sa sombre nuit :
On ne dessille jamais la paupière ;
Dedans ce lieu l'on n'entend aucun bruit.



Ces ténèbres où règne le silence,
Font le bonheur de ce cœur amoureux ;
Tout consiste dedans la patience
Qu'exerce ici cet amant généreux.


Madame Guyon  (1648 - 1717)



tableau de Bellini

mercredi 14 septembre 2022

 


ll me semble que les personnes qui écrivent des choses intérieures devraient attendre pour écrire que leurs âmes fussent assez avancées pour être dans la Lumière divine. Alors elles verraient la Lumière dans la Lumière même.
Elles verraient, comme une personne qui est sur une montagne élevée, voit les divers chemins qui y conduisent, le commencement, le progrès et la fin où tous les chemins doivent aboutir pour arriver à cette montagne ; on voit avec plaisir que ces chemins si éloignés se rapprochant peu à peu et enfin se joignant en un seul et unique point, comme des lignes fort éloignées se rejoignent dans un point central, se rapprochent insensiblement.

Madame Guyon, Écrits sur la vie intérieure, Arfuyen,, p. 23






mardi 13 septembre 2022

 


les âmes ne sont pas encore accoutumées à ce genre de vie, elle ont de la peine...à s'empêcher de tendre à force de voiles et de rames...dans cet océan de la Divinité.
Mais à présent qu'elles n'ont pour motif que l'unique plénitude...il ne faut plus qu'elles usent d'autres industries ni effort que d'un simple écoulement de cœur en Lui."


"On appelle cet exercice vie, parce que l'âme n'en doit jamais être privée, autrement on pourrait dire qu'elle serait morte, comme l'on dit d'un corps mort, qu'il n'a plus d'âme. Et aussi...on l'appelle vie simple... Il est impossible que l'esprit qui a goûté Dieu simplement, par habitude et non en passant seulement, puisse jamais trouver goût ni s'appliquer à le chercher autrement."


"Quand Dieu s'est fait goûter au fond de l'âme, il laisse une impression quasi éternelle, et qui rappelle à soi tous les mouvements d'esprit avec une telle force qu'il ne peut jouir d'aucune satisfaction ailleurs que dans ce fonds qui est son centre et sa vraie demeure."

Jean le Man (1617-1690)



lundi 12 septembre 2022

 



C'est un secret

et de ce secret
l'on ne sait rien.

Il y a ceux qui disent :
"Je le connais"

Et ceux qui affirment :
"Il n' y a pas de secret".

Ils se disputent souvent.

Arrive alors un homme
qui n'a plus rien
à cacher.

C'est ce qui le rend
secret.

Un secret qui marche
qui vit, parle.

Mais cela n'intéresse personne.

le secret demeure
et le silence vient.

dimanche 11 septembre 2022



"Quand on est ainsi prêt à tout, c’est dans le fond de l’abîme que l’on commence à prendre pied ; on est aussi tranquille sur le passé que sur l’avenir. On suppose de soi tout le pis qu’on en peut supposer; mais on se jette aveuglément dans les bras de Dieu ; on s’oublie, on se perd ; et c’est la plus parfaite pénitence que cet oubli de soi-même, car toute la conversion ne consiste qu’à se renoncer pour s’occuper de Dieu. Cet oubli est le martyre de l’amour-propre ; on aimerait cent fois mieux se contredire, se condamner, se tourmenter le corps et l’esprit, que de s’oublier. Cet oubli est un anéantissement de l’amour-propre, où il ne trouve aucune ressource. Alors le cœur s’élargit ; on est soulagé en se déchargeant de tout le poids de soi-même dont on s’accablait ; on est étonné de voir combien la voie est droite et simple. On croyait qu’il fallait une contention perpétuelle et toujours quelque nouvelle action sans relâche ; au contraire, on aperçoit qu’il y a peu à faire."

Fénelon, Oeuvres I, Pléiade, p. 577




vendredi 9 septembre 2022



Avoir le cœur à l'envers.
Et là où il devrait battre
il n'y a plus rien.

Un autre cœur est là
qui ne bat pas.
C'est lui la Réalité.

Et si tu ne comprends pas
ce n'est pas grave.
C'est pareil pour moi.

Je te souhaite d'être l'oiseau
que tu rêvais d'être, enfant.
Ne le quitte jamais.

Ainsi sommes-nous faits.
Ne reste de nous
que le rêve accompli

et que personne
ne voit.



 

jeudi 8 septembre 2022

 



"Un rien de temps, aussi petit soit-il, et le ciel peut être gagné et perdu....

Aussi donne toute ton attention à cette œuvre, et à sa merveilleuse manière,

intérieurement, dans ton âme.

Car pourvu qu'elle soit bien conçue,
ce n'est qu'un brusque mouvement,
et comme inattendu,
qui s'élance vivement vers Lui,
de même qu'une étincelle du charbon.
Et merveilleux est-il de compter les mouvements qui peuvent,
en une heure,
se faire dans une âme qui a été disposée à ce travail.
Et pourtant il suffit d'un seul mouvement entre tous ceux-là,
pour qu'elle ait,
soudain et complètement,
oublié toutes choses créées"

(Nuage d'inconnaissance, chapitre IV)



mercredi 7 septembre 2022

 




Ö Seigneur..Je suis fatigué de tant d'intelligence.
Ote-moi le pouvoir de raisonner
avec des mots habiles,
cette connaissance et cette logique
gaspillés en débats inutiles.
Ote moi l'aisance dans la bonne conduite,
ce vernis de culture du monde moderne.
Ote-moi l'arrogance
e s'il te plaît Seigneur, Hari
ôte moi la connaissance et la richesse.
Ôte-moi la crainte des sanctions
liées à l'étiquette sociale
et donne-moi la simplicité.
Je ne veux ni bhoga ou yoga.
Je ne veux ni honneur, ni prestige.
Seigneur, donne-moi le visage innocent du villageois,
le calme et la sérénité du brin d'herbe.
Donne-moi l'humilité et la pureté.
Donne-moi l'aptitude à vivre sans égoisme.
Donne-moi ton amour.
Empli mon coeur de foi et de bahkti pour Toi.
Emporte mon nom illusoire, cette idée de moi-même
qui me maintient séparé de Toi
et noie moi dans l'ocean de l'amour.


Kabir, 1398 - 1448 / Uttar Pradesh





mardi 6 septembre 2022

 Pépé Gem pendant

vingt sept ans

régna en maître

sur sa classe.


Et pendant tout ce temps

dans le bruit assourdissant

des calculs et des dictées,

par la fenêtre

une paire d'enfants

continuaient leur voyage

avec les nuages.






lundi 5 septembre 2022

 

Volontiers je m'approcherai de l'Amour,
si de l'intérieur je pouvais l'atteindre,
Mais nul ne saurait chanter ceci avec moi,
qui se mêle beaucoup aux créatures.

L'amour nu qui n'épargne rien
dans son trépas sauvage,
séparé de tout accident
retrouve sa pureté essentielle.

Dans le pur abandon de l'amour,
nul bien crée ne subsiste :
amour dépouille de toute forme
ceux qu'il accueille dans sa simplicité.

Libres de tout mode,
étrangers à toute image :
telle vie mènent ici-bas
les pauvres d'esprit.

Ce n'est point tout de s'exiler,
de mendier son pain et le reste :
les pauvres d'esprit doivent être sans idées
dans la vaste simplicité,

qui n'a ni fin ni commencement,
ni forme, ni mode, ni raison, ni sens,
ni opinion, ni pensée, ni intention, ni science :
qui est sans orbe et sans limite.

Cette simplicité déserte et sauvage
qu'habitent dans l'unité les pauvres d'esprit :
ils n'y trouvent rien, sinon le silence libre
qui répond toujours à l'Eternité.

Ceci est dit en un court poème,
mais le chemin est long, je le sais bien,
et mainte souffrance endure
qui le veut parcourir entièrement.

Hadewijch d'Anvers














dimanche 4 septembre 2022

 



"Quel étrange aveuglement pour notre esprit de ne point apercevoir
ce qu'il voit en premier, et sans lequel rien ne peut être connu.
Mais c'est comme notre œil, concentré sur diverses couleurs : 
il ne voit pas la lumière qui les rend visibles. Ou s'il la voit,
il ne la remarque pas. Il en est de même pour l’œil de notre âme :
concentrée sur les choses particulières et générales, 
il ne remarque pas l'être qui est au-delà de toutes les catégories,
alors que c'est l'être qui se manifeste en premier dans l'âme,
et que c'est grâce à lui qu'il voit le reste.
Ainsi la formule se vérifie pleinement : 'semblable à l’œil du hibou aveuglé 
par la lumière, l'œil de notre âme est ébloui par trop d'évidence'.
Habitué aux fantômes du sensible, dès qu'il regarde la lumière de l'Être souverain,
il lui semble ne plus rien voir.
Il ne comprend pas que cette obscurité suprême opère l'illumination de notre esprit.
Ainsi l'œil du corps en face de la pure lumière a l'impression
de ne rien voir." 

Bonaventure, 1259











samedi 3 septembre 2022

 



Le vaisseau laisse bien moins de traces sur les ondes que le serpent sous la pierre ; néanmoins on voit quelque temps comme un sillon sur les flots, qui est la trace qui ne dure guère. Si pourtant ce vaisseau était chargé de marchandises de garde, ces marchandises seraient une marque et une assurance des lieux où il a voyagé ; mais n’étant chargé que de pommes, que l’eau de la mer corrompt, on est obligé à mesure qu’elles pourrissent de les jeter dans la mer, de sorte que le vaisseau arrivant vide, il ne reste ni trace de son passage, ni vestige de ses marchandises. C’est la figure du parfait dénuement de l’âme ; il ne reste point de trace de son marcher qui puisse servir d’appui et d’assurance qu’il ait tenu la route de ces vastes mers et qu’il ait passé ce chemin ; il ne paraît rien de sa charge, qui s’est corrompue peu à peu, et cette corruption devient si grande qu’on est obligé de décharger le vaisseau de tout ce qu’il portait. Il est vrai que la misère que l’âme éprouve, est quelque chose de triste pour elle. Mais elle éprouve en même temps une chose à laquelle elle ne faisait pas d’abord attention : c’est que plus elle devient misérable, plus elle devient légère, elle se trouve peu à peu dégagée du poids d’elle-même ; enfin plus sa misère augmente, plus elle devient vide. L’âme ne se trouve plus chargée ni embarrassée ; au contraire, elle éprouve un certain vide qui lui a donné de l’étendue et de la largeur. Le vaisseau vide se trouve en état d’être rempli des plus exquises marchandises. Heureux vaisseau ! Tu te croyais méprisable et tout honteux de ta charge, tu en rougissais dans le secret ; c’est néanmoins cette charge pleine de pourriture qui t’a vidé de tout ce qui t’appartenait et de ce qu’il y avait de plus fort et plus intime dans l’amour de toi-même. Le fond de cale a été vidé, c’est-à-dire que tu es délivré de la propriété qui te corrompait profondément : ainsi tu es entièrement vide, net et balayé de ta pourriture. On a cherché dans les endroits les plus reculés s’il ne restait point quelque pourriture, pour la jeter dans la mer. Te voilà parvenu à une nudité entière !

Madame Guyon (1648-1717)












vendredi 2 septembre 2022

 


l'étrave fend 
l'eau grise du canal.

Le bateau laisse
derrière lui
un sillage éphémère.

Chacun avec sa vie
fend les flots.

Du sillage de l'histoire
bientôt tout s'effacera.

L'éphémère tombe en poussière.

Tant que le cœur bat,
mieux vaut le garder

vivant.





jeudi 1 septembre 2022

 





Est-ce si différent
l'amitié entre humains
ou avec un animal ?

Elle a commencé 
par un sourire.
l'oiseau a su lire.
Il voit bien plus loin
qu'on ne le croit.

Y-a-il des liens
qui libèrent ?

Un geste brusque.
l'oiseau s'envolera.

Un mot trop dur.
Une goutte de sang
sur l'aile.