jeudi 21 avril 2022

 


Le vert enchanté existe.
On le rencontre
au détour d'un chemin,
près de l'étang de Brin.

Il n'y avait pas
d'autre endroit
que celui-là

Et il n'y en aura 
jamais d'autre.

Parce que là,
par enchantement
tout est oublié,

et l'on sait
sans savoir
que demain sera bien

puisqu'aujourd'hui
l'était.




mercredi 20 avril 2022

 



Toujours la première aube,
toujours la dernière,

urgence de s'éveiller
du non-vivre

C'est maintenant
la première aube
et la dernière,

et si l'on dort
on se réveille
avec effroi

avec derrière soi
à la mort

toute une vie
que l'on n'a pas


vécu.








mardi 19 avril 2022

 


Edith est une sœur 
qui longtemps a cherché
ce qu'elle a trouvé
sur son lit de mort,
la main simplement
posée sur son cœur.

Edith est une sœur
au regard de prairie
au chant de bruyère
à l'âme des sapinières
où seul l'amoureux
demeure sans peur.

Edith est une sœur
pour ceux qui rêvent
jusqu'à la fin
d'autres mondes.




la poétesse Edith Södergran,

encre de chine sur bois


"Aux quatre vents

 

Aucun oiseau ne s'égare jusqu'à mon repaire,
pas de noire hirondelle porteuse de nostalgie,
pas de blanche mouette présage de tempête...
À l'ombre des rochers, ma sauvagerie aux aguets
est prête à fuir au moindre frisson, au moindre pas...
Ma félicité s'estompe et bleuit en silence...
J'ai une porte pour chacun des quatre vents.
Une porte d'or vers l'est – pour l'amour qui jamais n'arrive,
une porte pour le jour, une autre pour la mélancolie,
une porte pour la mort – elle reste toujours ouverte.

Edith Sôdergran







lundi 18 avril 2022

 



Avant que s'éteignent les couleurs,
avant que les sourires
soient des souvenirs,
les fleurs sont
sans peur et sans envie.

Avant que le jour revienne,
avant que les sourires
renaissent sur
la terre nouvelle,

les fleurs sont
sans question,
sans rébellion.

Elles meurent toujours
par amour.







dimanche 17 avril 2022

 

Ne rien retenir,
jusqu'à oublier
cette fausseté du
visage que l'on forge,

être traversé
de tant d'étoiles
que plus rien n'est
à dénombrer
dans l'étonnement d'être !

Il n'y a
qu'un vide ouvert
où fusent
par surprise
des chants d'oiseaux
veilleurs,

comme si tout
recommençait toujours.

La nuit a pleuré
sur la pivoine native.

Neuve, elle invite
à laisser se perdre
l'obscurité.

Aucun tombeau
n'est assez grand
pour contenir
le cri de la lumière !



Pâques, Passage,


Fusain et pastel sec,

d'après un tableau d'un artiste des Caraïbes




samedi 16 avril 2022

 



Tout se condense
en quelques brins d'herbe.
et un peu de soleil.

Poser sa tête,
s'y enfouir
avec sa névrose
sa nécrose,
s'y endormir,
s'y réveiller
avec le nez
qui chatouille
les étoiles,

que rêver d'autre ?

Oui, quelques brins d'herbe
valent bien tout l'or du monde.

Rien ne les effraye,
ni le sang, ni la mauvaise haleine,
ni les corps dans leur effondrement
ni les pensées de mouches noires.

Quelques brins d'herbe
et un peu de soleil.




vendredi 15 avril 2022

 


Sur une tombe,
trois colombes
avec un minuscule
bébé colombe.

La paix des morts
est-elle
à l'image
de la paix des vivants ?

Les vivants en guerre
espèrent la paix.

Les morts en paix
espèrent peut-être
pour les vivants.






jeudi 14 avril 2022

 


Blancheur presque éblouissante
du cygne qui s'est éloigné
de la rivière.

Il interpelle,

ce vilain 
petit
canard

qui est passé de la grisaille
à la neige immaculée.






mercredi 13 avril 2022

 

Les murs dansent aussi.

Ils attendent les passants
sortis de leur cauchemar

qui voient plus loin
que leur morosité

et dansent le cœur 
bordé d'enfance

sans haine de soi,

sans haine
tout court.









mardi 12 avril 2022

 


Ce monde a des lueurs incertaines.
Les murs ne sont pas muets.

Des portes s'ouvrent
soudainement
pour laisser
chanter les pierres
avec des filaments
de firmament.

Ce monde est flamme
et cendres entremêlées.

Les murs peuvent 
être traversés.













lundi 11 avril 2022

 



Les aigrettes du pissenlit
bientôt vont s'envoler.

Et par le vent
d'autres fleurs
vont naître.

Qu'est-ce que le vent
emportera de l'homme
qui ne fleurit plus ?




dimanche 10 avril 2022

 




"Dureté et rigidité
sont compagnons de la mort
Fragilité et souplesse
sont compagnons de la vie"
Lao Tseu

S'enrouler comme
la glycine,
s'éloigner
comme la brume.

Il n'y a aucune raison
de se durcir.
S'endormir
à l'abandon
dans un grand lit blanc.

Si rien ne résiste,
le vent reste silencieux

Etre en silence.
La digue ne retient rien.
Accepter et devenir vivant.










samedi 9 avril 2022

 



Les fleurs ignorés
de tous ne faneront plus
et joueront
ici ou ailleurs
avec les oiseaux
sur les arbres
qui tremblent.

On se comprendra 
enfin sans parler.

Chacun aura retrouvé
le regard
qui pour la première fois
découvre la lumière.

Et la lumière
ne faiblira plus.

Les fous et les enfants
ouvriront le chemin
dans la cendre

et on viendra
recueillir leurs larmes
pour que cesse le désert.












 




Traversée des apparences,
traversée des illusions,
la trame est serrée.

Dépouillement.
La raison
doit rendre raison.

Ne passe qu'un silence
et un cœur broyé
qui ne prétend plus rien.









jeudi 7 avril 2022

L'arbre regarde l'homme

qui se détruit

à petit feu

à coups de feu.


Dommage,

on aurait pu

être amis

si tu avais su voir

combien je te ressemble,

combien sans moi

tu déracines ta vie.



 

mercredi 6 avril 2022

 


Dans la boite à couleurs
impossible
de trouver
le vert espérance.

Dehors il pointe son nez
pourtant
au bord des chemins
près des orées
au creux des jardins.

Espérance, petite sœur
qui voit plus loin
que l'espoir humain,

Espérance
de revenir un jour,
tout autre,
enfin accueilli,
là d'où l'on vient.









mardi 5 avril 2022

 



Le réel est-il dur ?

On est plutôt dur
avec le réel.

On n'échappe pas
au réel
et pourtant
on le fuit.

Le réel
c'est finalement
une histoire d'amour
qui finit parfois mal
car on n'a pas su 
l'aimer vraiment.

C'est comme la rugosité
d'une planche de bois.
On peut l'ignorer
par peur des échardes
ou y déposer un baiser

signer le pacte véritable
d'une vie retrouvée.










lundi 4 avril 2022

 



Les mots sont une échelle.
Ils montent et descendent.
Nul ne sait d'où ils viennent.


Ils prennent la couleur
d'un bouton d'or.
Ils ont la transparence verte
d'une jeune feuille.


Les mots sont 
des petites flammes
de veilleuses.
L'obscurité qui n'était rien
s'éloigne.


Ils viennent au rythme
d'un battement de cœur
qui leur donne des ailes.
Ils pépient, ils gazouillent.


Ils entourent l'aube
d'un collier de nuages éphémères.
Les mots sont de passage
et laissent un goût de miel.


Les mots pleurent doucement
sans mot dire
sur la terre aride
qui crie sa soif.


les mots pauvres
en errance
ressemblent à des bulles
qui à peine nées
retournent au silence.