jeudi 30 avril 2020


"Ouvertures"

3 monotypes






Il suffit parfois
d'une porte et de fleurs.
Il n'y a qu'un pas à faire,
même petit.

Pas besoin de sonner.
On sait qu'on est accueilli.

On se reconnait.
C'est le plus important.
Chacun est l'hôte
de l'autre.

Viens dans mon auberge.
Ton cœur meurtri
se joindra au mien.



mercredi 29 avril 2020


Comme des petits papillons
qui ne connaîtront jamais l'été
des fleurs de marronnier
gisent sur le trottoir.

Elles ont été.
Je suis encore.

Avant que l'on inscrive
sur du bois,
ici-gît un passant,

je suis présent
aimant ces fleurs

de rien
pour rien.




Deux monotypes






mardi 28 avril 2020


Pollen et deux monotypes






J'ai descendu l'escalier
et l'ayant aperçue
sous le ciel gris
je me suis dit :
"D'où est-elle venue ?"

Hier, je n'avais rien vu.
Et aujourd'hui
une étoile mauve
est apparue.
D'où est-elle venue ?

D'où suis-je venu ?
Je ne saurais pas répondre.
Mais puisque je suis apparu
je veux ouvrir
mes pétales d'étoile.


lundi 27 avril 2020



La crête principale de l'Himalaya
vue des hauts plateaux du Tibet

peinture à l huile





"Dureté et rigidité
sont compagnons de la mort
Fragilité et souplesse
sont compagnons de la vie"
Lao Tseu

Je m'enroule comme
la glycine
et je m'éloigne
comme la brume.

Il n'y a aucune raison
de me durcir.
Je suis déjà endormi
à l'abandon
dans un grand lit blanc.

J'ai lâché du vent
et cela n'a fait aucun bruit.
Quel visage s'est penché vers moi ?

Il n'y avait rien
et la digue ne retenait rien.
Accepter et devenir vivant.



dimanche 26 avril 2020

Au bon endroit,
la graine.

Et le vent aussi
qui l'emportera.

J'y suis aussi,
même déchiré
où bat encore
le pouls de la nuit.

Au bon endroit,
j'attends
d'être reprisé.

Retrouvé.
Accueilli.



« Pour arriver au cœur de la rose, 

nous n’avons qu’à prendre le chemin de la rose,

aller à elle selon sa voie. 

S’approcher avec une telle absence de soi,
 

avec une telle légèreté, sans troubler sa proximité,
 

entrer à pas de parfum dans l’eau de son parfum.»

Hélène Cixous




samedi 25 avril 2020


Les larmes

gravure pointe sèche


Silence de la clématite.
Silence des mots.
Rien ne vient.
Je n'ai pas peur
que rien ne vienne.

Pendant que j'écris
je suis avec elle.
Sa lumière est aussi
la mienne.

Clématite, je t'aime.
Je ne te désire pas.
Il y a plus de bonheur
à aimer qu'à désirer.



vendredi 24 avril 2020


Vieille chapelle de montagne 
près de Vallouise (Hautes-Alpes)

linogravure



Un homme aveugle
de naissance
à qui on rendrait la vue
ne verrait que de la lumière,
puis commencerait
à apercevoir peu à peu
des objets séparés.

Et pour cet escholtzia,
j'ai fait le trajet inverse.



jeudi 23 avril 2020


Il n'y a pas de lassitude.

les fleurs s'ouvrent
sur un autre espace.

il est alors
impossible
qu'elles fanent.

Elles montrent
ce qui est appelé
à se poursuivre,

intérieurement.




mercredi 22 avril 2020

Toujours en mouvement vers,
"Tournesolverisées",
les fleurs aussi
cheminent,

même près
des cheminées
qui toussent
leurs fumées.

Je suis né,
j'ai cheminé.
je cheminerai

Ici, je ne peux pas
demeurer.





Peinture à huile sur carton

(d'après un autoportrait de Joshua Reynolds, 1723-1792)



mardi 21 avril 2020

Sous-bois ensoleillé
gravure pointe sèche

d'après une photo de Christine Saint-Geours
que je remercie



A l'ombre d'un géant
les tulipes sont
tranquilles et lumineuses.

Elles n'ont pas besoin
d'être grandes
ni d'être  vues de loin.

Je n'ai pas besoin d'être grand,
seulement d'être moi-même,

de me regarder
comme une tulipe
douce et tranquille
à l'ombre d'un géant.













lundi 20 avril 2020


Aurait-elle peur
d'être oubliée 
cette porte à la poignée
peinte en jaune ?

Je ne sais pas.

Je ne sais pas
non plus
ce qu'il y a
derrière la porte.

Certains affirment
que nous vivons
le temps de la
cinquantième porte.

Seule la douceur
avec soi-même
permet de la franchir.




dimanche 19 avril 2020


Bords de Loire, près de Bourbon-Lancy

peinture à l'huile,
d'après une photo





Fleurs de pommier
ou de cognassier,
peu importe,

Je vous salue
avec le merle,
seul chanteur
des rues désertées.

Je vous salue.
Personne ne posera
la main sur vous.

Personne ne ternira
votre éclat.
Les mots blancs
restent gris.



samedi 18 avril 2020

J'aime toujours
souffler sur le pissenlit
en graines.

Des chercheurs ont découvert
qu'au-dessus de chaque graine
se formait un vortex
qui permet à celle-ci de profiter 
de courants ascendants
pour être emportée sur
de plus grandes distances.

J'aimerais qu'il se forme
un vortex au dessus de ma tête
pour que je respire
avec la légèreté d'un enfant.



vendredi 17 avril 2020

Sous l'arbre de Judée
j'ai vu le soleil qui riait
et même s'il ne faut pas jurer
je jure que c'est vrai.

Et je serai bien resté
pour rire avec lui.
mais j'ai eu une autre idée
et je l'ai laissé

rire avec le soleil.



jeudi 16 avril 2020


Imploration

peinture à l'huile
(d'après un tableau de maître inconnu)



Quelques pétales
rassemblées par le vent
sur un trottoir
vont disparaître.

Et l'arbre reste
oublié du regard.

Il n'en est pas
moins vivant.

Je chante pour lui
et tous ceux
qui continueront
à le voir.



mercredi 15 avril 2020

Vosges enneigées (près de Belmont)

peinture à l'huile




Chaque arbre a
un éclat particulier.
Le hêtre pourpre
a un éclat qui est
presque un éclair.

Je me suis arrêté net
devant lui.
Coup de tonnerre.
Incandescence.

Le hêtre pourpre vit
d'une vie brûlante.





mardi 14 avril 2020




Les arbustes se courbent
forment une arche naturelle.
Le vert des feuilles
est encore printanier.

Je vais sortir
dans la lumière
d'une rue vide.

Ne sort-on pas
toujours
vers la lumière ?



lundi 13 avril 2020

Le hêtre tortillard
n'a pas de plan.

Il ne gère
ni n'assure rien.

Le hêtre tortillard
a été une graine
et finira au feu.

Je ne démélerai pas
ses branches
et comme lui,
je fais confiance.



dimanche 12 avril 2020

Portrait de Lilian Silburn


A mes pieds
dans la ruelle
sombre
une violette.

C'était elle
et pas une autre,

une violette
plus que violette,

un condensé de vie
d'un centimètre.

Mais d'où venait
le bleu sur ses pétales ?



samedi 11 avril 2020


J'ai tiré un vieux volet
dans la rue
du Haut-de-Chèvre,

Et derrière
un petit nuage dormait.

Et j'ai vu en lui
toute l'espérance
du jour d'après.


vendredi 10 avril 2020

Jésus d'après Memling

peinture à l'huile





le tableau de Memling




Il neige près des cerisiers.
Une brise légère suffit.

Où vont se poser
les pétales blancs ?

J'aimerais qu'il neige
plus fort encore

pour que le monceau
d'inutile soit enseveli.

Mais le monde est monde
et il n'est pas vrai,

tant que la seule chose
qui compte
ne compte pas
encore assez.




jeudi 9 avril 2020



Dans une déchirure (un texte de 2012)

Si on lui demandait ce qui l'habite intérieurement, il y aurait une litanie de voix humaines qui se rassemblent et cherchent un passage dans la mer du ciel. 
Rien d'autre que des voix ! Voix souvent qui ne comprennent pas, voix perdues sans appui et dont il est le compagnon, voix qui se délivrent de l'effondrement, ruines et cendres auprès de l'unique fleur qui joue avec la lumière !
Voix passées au crible de l'angoisse qui cherchent des visages où reconnaître leur nom d'homme et vont brisées seulement, crécelle au cœur, dont on s'écarte invisiblement !
Il est avec ses voix,  si proche d'une naissance lorsque l'élan de l'enfant est accueilli d'un simple sourire radieux et que profondément le fil se renoue entre les vivants et les morts !
Tout se pardonne alors dans un cercle qui se referme.
Le vent a emporté les dernières lettres d'un pourquoi sans réponse !
Ne reste plus que noblesse des feuillages naissants de la colline.
Il pose sa tête doucement sur l'épaule d'un monde où il fait bon !
Il écrit ces quelques mots avec son dénuement.
Il écrit humain comme on goûte du pain et boit un verre
d'eau fraîche au sortir d'une fièvre, habité de silence,
dans une déchirure où l'on respire enfin !





mercredi 8 avril 2020


Il veille
un avec l'arbre.
Rien ne l’embarrasse.

Silencieux
avec le silence
parmi les humains
qui pensent,

il est un 
avec l'air pur retrouvé
de la ville immobile.

Et quand il roucoule
il suit des yeux
l'espace où ses ailes
l'emmènent



mardi 7 avril 2020

Arbres du parc de l'Asnée
(d'après une photo prise en automne)

Peinture à l'huile sur carton





Ignorée, méprisée,
arrachée,
la fleur du pissenlit.

Je l'ai regardée.
Je me suis arrêté.
Je n'étais pas pressé.

On dirait un dahlia.
On dirait un soleil
et même un parasol.

Tout est là
à mes pieds,
de l'or, des émeraudes, des rubis.

Je prendrai soin de ma vie.



lundi 6 avril 2020


Sur la place Aimé Morot
jaune, vraiment jaune
en extase est le pavot.

Il vient de naître.
Une trace est encore
sur ses pétales.

Naître, toujours naïtre.
On nait 
pavot,
mais on ne nait pas
homme.

Je ne veux pas
m'arrêter
en chemin.