jeudi 31 août 2023

 



Parfois dans la forêt
un arbre tombe
sans que personne
ne le remarque.


Il montre une direction.
Peut-être est-ce
ce qu'un jour il a vu
au plus haut de lui-même.

Il a vu ce que 
les autres arbres
ne voient pas,
fiers de leurs racines,
fiers de leur force.

Lui, il a grandi à l'ombre
de ceux qui ne savent pas
écarter leurs branches
pour laisser passer
un peu de lumière.

Alors, il s'est tendu
de toutes ses forces.
C'est là-haut qu'il voulait aller,
là-haut pour les étoiles
qui lui auraient appris
à respirer.

Mais il était si frêle.
Il suffisait qu'une corneille
se pose à son sommet
pour qu'il ploie un peu.

Alors un jour
l'arbre est tombé
juste dans la direction d'une clairière,
celle qu'il avait  vue un matin
inondée de lumière.


mercredi 30 août 2023

 


Ce matin, 6h30,
aube toute simple

le soleil émerge
doucement
d'une brume
née après la pluie.

Simplicité
intérieure
sans effort.

La nuit
a emmené
avec elle
tout le fatras inutile.




mardi 29 août 2023

 


Parc Olry,
ce matin,
simple touffe
d'herbes

le mouvement
horizontal
ressemble
à une vague,

une vague verte,

un peu figée,
un peu animée
par le vent.







lundi 28 août 2023

 Un nuage du soir

hier

au loin

prend la pause.


Et repart,

et n'est déjà

plus le même.


Toi aussi,

tu repars

au loin,

hier

ou demain,


tu n'es déjà

plus le même.




dimanche 27 août 2023

 



Chemin des Fraises,
près d'Art-sur-Meurthe.

Un tournesol
est encore 
tourné
vers le soleil
pendant
que tous les autres
baissent la tête
vers la terre.

Un petit 
tournesol
de rien du tout
parmi des géants
déjà fanés.





samedi 26 août 2023

 Etang Tauru,

vers midi.


L'écriture

des roseaux

à la surface

de l'eau


laisse passer

les nuages,

le silence,


Rien à déchiffrer.

Simplement

accueillir.






vendredi 25 août 2023




A l'abri de la chaleur
marche en forêt.

Silence étonnant.
Même les mésanges
et un pic-vert aperçu
soudainement
ne font pas de bruit.

Ils frôlent les feuillages.
Ils sont sans cesse en mouvement.

C'est comme si les arbres
veillaient sur le silence,

des poches de silence
qui peut-être
pourront servir un jour

On transfuse bien le sang.
Un jour peut-être
transfusera-t-on le silence,
sous ordonnance.

Vous êtes trop bruyant 
en vous-même, monsieur :

Prescription ?

une poche de silence
à transfuser
de préférence le matin,
pendant une semaine.


 

jeudi 24 août 2023

 



Bords de Moselle
près de Méréville.





Qui saura
où est le ciel,
l'eau ou
la terre,

et même
les arbres ?






mercredi 23 août 2023

 





Plateau de Malzéville
vers 9h30 .

Rien à voir
que quatre arbres
dans la lumière
matinale.

Rien à voir et pourtant,
ce lieu ordinaire
soudain
n'y est plus.

Il est devenu
un mystère,
une porte,
une vision

pour celui 
qui veut 
bien voir.



mardi 22 août 2023

 

Un  "tircis"
ou "bois moucheté"
se prélassait 
au soleil

sans se douter
qu'il était
photographié
de plus en plus près.

Tu as bien raison
de ne rien craindre.

Mais n'oublie
pas de t'envoler,
loin des hommes craintifs
qui oublient
de folâtrer,
cherchant
si fort
une solution
pour ne pas mourir,
qu'ils mènent
une vie au rabais.












lundi 21 août 2023

 

Portrait de Kathleen Raine (1908-2003) poétesse

pastel sec


Parce que j’aime
Le soleil répand ses rayons d’or vivant
Répand son or et son argent sur la mer.

Parce que j’aime
La terre sur son fuseau astral déroule
Sa danse qui fait naître l’extase.

Parce que j’aime
Les nuages voyagent dans le vent à travers de vastes ciels,
Les ciels vastes et beaux, bleus et profonds.

Parce que j’aime
Le vent souffle dans les voiles blanches,
Le vent souffle sur les fleurs, le doux vent souffle.

Parce que j’aime
Les fougères poussent vertes, et verte l’herbe, et verts
Les arbres transparents ensoleillés.

Parce que j’aime
Les alouettes jaillissent de l’herbe
Et toutes les feuilles sont pleines d’oiseaux qui chantent.

Parce que j’aime
L’air d’été frémit de milliers d’ailes,
Des yeux, bijoux par myriades, brûlent dans la lumière.

Parce que j’aime
Les coquillages irisés sur le sable
Prennent des formes fines et compliquées comme la pensée.

Parce que j’aime
Il est un chemin invisible à travers le ciel,
Les oiseaux passent par ce chemin, le soleil et la lune
Et toutes les étoiles voyagent par ce sentier la nuit.

Parce que j’aime
Il est une rivière qui coule toute la nuit.

Parce que j’aime
Toute la nuit la rivière coule, entre dans mon sommeil,
Dix mille choses vivantes dorment dans mes bras,
Et veillent en dormant, et passent immobiles.

Kathleen Raine







-A la barbichette-

Cette nuit, j'ai joué
à la barbichette
avec la vérité.
Je me tiens,
tu me tiens.
Le premier de nous deux
qui rira aura une tapette.

Je l'ai regardé
droit dans les yeux.
Cela fait drôle
de regarder la vérité
dans les yeux.

Rien de faux,
rien de contraint,
rien de forcé
dans son regard.
Cela a été instantané,
j'ai ri.

Alors j'ai reçu
une tapette.
Ce n'était pas du tout
comme je me l'étais imaginé.

Je m'attendais à un coup de poing
qui me ferait voir
pleins d'étoiles
dans la tête,
ou à une gifle bien sonore.

Pas du tout !
C'était très doux.
J'ai senti une main
qui m'enlevait toute cette peur
accumulée pendant des années.

Ce n'était pas une mise à nu,
ni une mise à mort.
C'est comme si sa main
m'invitait à me reposer
au cœur de mon être...

enfin libéré de tout
ce qui est faux




dimanche 20 août 2023

 


Il y a toujours
un rouge-gorge discret

qui au moment voulu

tient compagnie

en trois notes

au solitaire de l'aube !

Il est avec une promesse

qu'il peut enfin tenir,

comme noyé dans

une eau profonde

où seules douceur et paix
s'engendrent .

Cette terre peut-être le ciel
lorsqu'il n'y a
plus rien à saisir !

C'est comme si deux rives
s'étaient rejointes.

Le vent a trouvé un passage.
Qui aurait pu le retenir ?
Est-ce l'arbre, 
le vent, la terre qui chante ?
C'est seulement
lorsque du vide et de la nuit
un visage vient de naître.

C'est seulement
lorsque la porte s'ouvre,
que tout est envahi,
enfant tout démuni
à la merci des étoiles
et de l'océan qui gronde,
c'est seulement là
que le chant trouve une voix
qui ne s'éteindra plus !





samedi 19 août 2023

 



Océan du divin Amour. 

 O Rayon ténébreux d'une immense clarté ; 

O nuit ! ô torrent de lumière , 

Pur amour, simple Vérité, 

Source de bien, Cause Première ! 

Doux centre du repos, 

Céleste volupté, Sacré monument de la gloire !

 Doux nœud d'une pure unité,

 Absorbement de la mémoire ! 

Auguste Majesté, chaste & sublime amour,

 Charité pure essentielle ! 

Nuit plus brillante que le jour, 

Ta clarté devient éternelle. 

Mais que dis-je clarté ; tout me paraît obscur ;

 C'est un abîme impénétrable :

 Cependant mon cœur est très-sûr 

Que sa lumière est véritable. 

Dans ce vaste Océan, dans cette mer d'amour 

On ne voit rien que l'amour même :

 Ce que je viens d'appeler jour, paraît ténèbres quand on aime.

 L'amour si pur en soi ne nous laisse rien voir ;

 Il absorbe dans sa lumière : 

On ne peut connaître ou savoir ce qu'on découvre en ce mystère. 

Nul objet singulier, un abîme profond

 Environne toute notre âme : 

Ce qui la perd & la confond, 

C'est une mer toute de flamme. 

Mais flamme sans brillant pour notre propre esprit, 

Quoiqu'une source de lumière, 

Qu'on ne comprend, qu'on ne décrit

 Que d'une trop basse manière. 

Ce qu'on veut expliquer, se dérobe à nos yeux

 Sitôt qu'on prétend de le faire ;

 Et pour moi , j'aime beaucoup mieux , 

Au lieu de l'énoncer, me taire. 

C'est le meilleur parti. 

Mon cœur consacrons-nous

 Pour jamais au profond silence : 

Amour , il me sera plus doux 

Que de te mettre en évidence.


Madame Guyon (1648-1717)




vendredi 18 août 2023

 


-C'est tout-

Une petite ritournelle,
ce qui sautille,
ce qui est vif,
un air, une danse pour rien,
une main qui prend
conscience qu'elle est
fermée, enfermée,
une main qui se détend,
une envie de respirer
plus profonde, plus vraie,
plus large aussi,
un voile à arracher,
vivre, se sentir vivre
près d'un torrent,
suivre son chant,
l'eau fraîche
qui réveille,
donne l'élan,
un refrain qui revient,
être accordé enfin,
un souhait, une réalité,

c'est tout,
pour ce matin.


    Aube du 14 aout 2023



jeudi 17 août 2023

 


Ne marcher
que vers sa liberté.
Le reste est détour
pour continuer
à être mené

par ce qu'on 
ne veut pas voir,
pas comprendre,
pas accepter.

On te presse
de revenir
en pays asservi.

Viens marcher
droit devant
en pays large
en pays "respirant"

L'élan ne t'appartenant pas
te sera donné.





mercredi 16 août 2023

 

Balade autour du Léomont près de Lunéville










 

Au palais endormi
le roi, le seul
qui ne dort pas
guette le retour
de son fils.

Une mauvaise fée
d'un coup de baguette
lui a fait oublier
qu'il était un prince

A force d'attendre
de scruter l'horizon
tout en haut
du donjon,

la tour s'est mise
à pencher,
le château
à vaciller.

Pourtant il suffirait
d'un baiser qui le
saisisse en entier
pour que le fils
reconnaisse
ce qu'il est.

le roi attendra même
les yeux fermés.
Le fils reviendra

Car seuls ceux
qui se sont perdus
peuvent être
retrouvés.




mardi 15 août 2023

 



Un seul point,
un seul arbre,
un seul être,
une seule vie,

un instant,
une cible,
un point,
un cœur,

sans lieu,
sans temps,
sans histoire,

oh,

un




 


Portrait d'Henri Michaux, poète

pastel sec





Poussant la porte en toi, je suis entré
Agir, je viens
Je suis là
Je te soutiens
Tu n'es plus à l'abandon
Tu n'es plus en difficulté
Ficelles déliées, tes difficultés tombent
Le cauchemar d'où tu revins hagarde n'est plus
Je t'épaule
Tu poses avec moi
Le pied sur le premier degré de l'escalier sans fin
Qui te porte
Qui te monte
Qui t'accomplit

Je t'apaise
Je fais des nappes de paix en toi
Je fais du bien à l'enfant de ton rêve
Afflux
Afflux en palmes sur le cercle des images de l'apeurée
Afflux sur les neiges de sa pâleur
Afflux sur son âtre... et le feu s'y ranime

AGIR, JE VIENS
Tes pensées d'élan sont soutenues
Tes pensées d'échec sont affaiblies
J'ai ma force dans ton corps, insinuée
...et ton visage, perdant ses rides, est rafraîchi
La maladie ne trouve plus son trajet en toi
La fièvre t'abandonne

La paix des voûtes
La paix des prairies refleurissantes
La paix rentre en toi

Au nom du nombre le plus élevé, je t'aide
Comme une fumerolle
S'envole tout le pesant de dessus tes épaules accablées
Les têtes méchantes d'autour de toi
Observatrices vipérines des misères des faibles
Ne te voient plus
Ne sont plus
 
Équipage de renfort
En mystère et en ligne profonde
Comme un sillage sous-marin
Comme un chant grave
Je viens
Ce chant te prend
Ce chant te soulève
Ce chant est animé de beaucoup de ruisseaux
Ce chant est nourri par un Niagara calmé
Ce chant est tout entier pour toi
Plus de tenailles
Plus d'ombres noires
Plus de craintes
Il n'y en a plus trace
Il n'y a plus à en avoir
Où était peine, est ouate
Où était éparpillement, est soudure
Où était infection, est sang nouveau
Où étaient les verrous est l'océan ouvert
L'océan porteur et la plénitude de toi
Intacte, comme un œuf d'ivoire.
J'ai lavé le visage de ton avenir.

Henri Michaux