lundi 30 décembre 2019



Dominant les gorges de l'Alagnon
les ruines du château de Leotoing
ne défient plus rien.

Elles s'effondrent lentement
à fière allure.

Effondrement.

Tu te dressais vers le ciel
et c'est le ciel qui te dresse.

Quand toutes les pierres
auront roulé
jusqu'au pied de la rivière,
je reviendrai peut-être
m'émerveiller de l'ondulation
des herbes sauvages
sous le vent.

Effondrement.
Le ciel reconstruit
toujours autrement.







dimanche 29 décembre 2019

Sur les hauts plateaux du Cézalier,
partout est l'espace.

Cela s'espace en moi
à voir le large
et les lignes douces,
la lumière, la neige.

Là-bas, on voit
le vent par les arbres
qu'il a sculpté.

Et les nuages paraissent
montagnes
et inversement.

C'est étrange
que là où il n'y a rien,
on se sent plus proche
de son humanité.









samedi 28 décembre 2019



Dans ce surgissement
de la conscience,

nette, claire,

un surgissement natif
qui n'est entaché 
de rien,

est-ce le chat
ou l'homme
qui voit ?

Fraîcheur absolue
du commencement,

toujours
je commence,
je commence
je commence

à vivre



dimanche 22 décembre 2019

Quand le moineau construit son nid dans la forêt, il n'occupe qu'une branche. Quand le cerf étanche sa soif à la rivière, il ne boit pas plus que son estomac ne peut contenir. Nous accumulons les choses parce que nos coeurs sont vides !

Anthony de Mello 



A bientôt, au 27 ou 28 décembre
-Le baiser-

La fenêtre est devenue nuit.
Quelques étoiles brillent,
de simples lampes
dans les cuisines.

Ce sont des maisons lointaines,
vaisseaux aux cales remplies
d'histoires ignorées.
Les larmes et les rires tanguent
dans les barriques du temps.

Je suis seul sur la colline,
à bord d'une maison immobile.
Qui veut connaître mon histoire ?

Un homme naît, un homme meurt.
Je suis entre deux rives
cherchant le Nord.
Une étoile suffirait.

Je ne triche pas,
grand enfant sur la paille,
sans mérite, ni vertu,
sans prestige, ni pouvoir.

Je sais tout juste crier le ciel en moi, 
dans la nuit qui est tombée sur la ville,
mais aussi sur les cœurs oubliés.

L'enfant  qui pleurait
dort maintenant.
J'ai pensé que personne
ne souhaitait  la mort
et que la folie était une plaie
qu'on oublie d'embrasser.

Puis j'ai reçu le baiser
d'une fenêtre obscure.

décembre 2017


samedi 21 décembre 2019


Le panier des rêves
est percé.

Au fond, le réel.

La raison ne sait rien.
C'est une croyance
comme une autre.

Désormais,
en moi,
cela sait
que c'est cela.

Il n'y pas
qu'un seul cœur
qui bat.

La Présence
est entre nous tous,

entre 
en nous tous.






vendredi 20 décembre 2019



...Même l'herbe et sa rosée trouvent un chant
pour ce qui est douleur.
Je resterai là.
Ce n'est plus une croix.
Dans chaque main un soleil se dépose.
Mon heure est venue,
je n'en bougerai plus.
Une parole nourriture qu'on ne prend pas
mais qu'on accueille, est là à chaque pas,
à l'allure d'un ruisseau tout empli de fraîcheur....

Mai 2019





jeudi 19 décembre 2019



Dessin au fusain

Personnage imaginaire


Laisser se déposer.
Ce sont trois mots
qui me viennent.

Je dépose le harnais.
Je trouve une place.
Je rentre dans la tête
d'un pêcheur à la ligne
qui se moque 
d'attraper du poisson.

Quelque chose
qui n'est pas une chose
va apparaître.
Cela se dépose
Je m'y dispose.

Il n'y a plus d'histoires.
Je ne me raconte pas d'histoires
à le croire.

Il n'y a plus rien à cacher.
Il n'y a plus rien
et ce n'est pas rien.

C'est clair comme
la crête noire d'une montagne
au petit matin.

C'est quelque chose
qui n'est pas une chose
qui prend sa place
et c'est la mienne,

libre.


mercredi 18 décembre 2019


Le parapluie ne te protège plus.
Il est devenu montgolfière.
Tu marches le long d'un mur
et ne le vois plus.

Tu as posé tout ton corps
sur la terre.
Tu t'y es enfoncé.
La terre t'a englouti

Et maintenant tu ne vois plus
ce qui te retiendrait.

Tu es toujours là.
Tu n'as pas quitté la terre.
Mais elle parle un autre langage.
Elle s'est ouverte
comme une fleur de pavot.

Tu es toujours là
mais tu marches d'un autre pas.
Le silence te guérit
et cela ne vient pas de toi.





Trois monotypes








Regard nomade

Dessin au fusain



mardi 17 décembre 2019


Mes mots, une outre
pour tenir au jour,
ne vous enfuyez pas trop loin.

Sous quel arbre,
n'y avait-il plus rien à dire ?

Sous quel sable
le trésor se tenait-il ?

Mais un trésor
cela se partage.
Dans le désert ce n'est rien.

A peine deux doigts
suffisent pour éteindre
la mèche du ciel.

Mes mots-poussières
se déposent comme
des flocons de neige.

Un peu de sel,
et puis plus rien.

Rien, pourtant
j'ouvre les yeux,
ou plutôt
j'ouvre l'humain.

Sous quel ciel
verrais-je plus loin ?

Alors, vois, lis
au delà des lignes.
le désert sera bientôt fini.

Décembre 2017




Le philosophe Ken Wilber (dessin au fusain)



lundi 16 décembre 2019

"Je pense qu’en ce moment
personne peut-être ne pense à moi dans l’univers,
que moi seul je me pense,
et si maintenant je mourais,
personne ni moi ne me penserait.

Et ici commence l’abîme,
comme lorsque je m’endors.
Je suis mon propre soutien et me l’ôte.

Je contribue à tapisser d’absence toute chose.

C’est pour cela peut-être
que penser à un homme
revient à le sauver."

Roberto Juarroz (1925-1995)



Quelques lumières
dans la cabine d'une péniche
ouvrent la nuit
qui n'est plus si sombre.

Il y a là-bas
un peu de chaleur,
des passagers
qui se savent en voyage.

Il y a là-bas des vivants
avec leurs colliers
de peine et de joie.

Je ne suis pas si loin de toi
et ce qui nous sépare
peut être franchi
par delà les eaux noires.

Ainsi font les étoiles
qui forment des constellations.

Ainsi pense Roberto* le poète
qui écrit que penser à quelqu'un
revient à le sauver.

Ainsi tisse sa toile
une drôle d'araignée
qui n'attrape que 
les larmes de la rosée.


*Roberto Juarroz



dimanche 15 décembre 2019


A l'étang Saint-Pierre,
il n'y a pas de vent,
il n'y a pas d'oiseaux,

seulement l'eau
les roseaux et les arbres
immobiles.

Je vois cela,
mais qui est ce je
qui voit ?

Et si il n'y avait plus
de vivant pour voir,

que verrait l'eau ?
Que verraient les arbres
et les roseaux ?

Voit-on le silence
quand il approche
et que tout
absolument tout 
est enlevé

et qu'il n'y a plus personne,
même plus 
un homme pauvre et nu.




samedi 14 décembre 2019


La pureté des lignes
de la nef de Saint-Jean-aux-Bois
parle d'un ordre simple et possible.

Si cet ordre existe,
un ordre libre et qui s'élance,

pourquoi je n'arrive pas
à le vivre intérieurement ?

Est-ce l'élan
qui manque ?

Es-ce la conviction
que c'est possible ?

Est-ce la soif de simplicité
qui n'est pas assez forte
pour tarir
toutes les sources néfastes ?

Ou simplement
ma résistance à voir
qui je suis vraiment ?




vendredi 13 décembre 2019



L'Anima

«Figures inconscientes de l'autre apparaissant dans les rêves, les mythes, les arts, les religions, cet autre se présentant avec les caractères du sexe opposé (ce que l'on définirait aujourd'hui comme du genre opposé) : anima chez l'homme, animus chez la femme. Ces deux archétypes fondent la conception jungienne d'une bisexualité psychique.

Anima et animus suscitent des représentations qui tendent à se personnifier comme on peut le voir par exemple dans les rêves où l'anima et l'animus apparaissent sous les traits d'une femme ou d'un homme inconnu. Ils se manifestent aussi, d'une façon qui reste souvent inconsciente, par des projections qui induisent certains comportements et jettent le trouble dans les relations de l'homme et de la femme.»
(Extrait de la définition de l'Anima qui figure dans le Dictionnaire Jung, page 22.)

Dessin au fusain





Au bord de l'Oise,
je remonte le temps.

Je vois un vélo
qui suit le courant
et affronte le vent,

et de jeunes enfants
qui dorment encore
et leurs rêves suivent
le même mouvement
que la rivière.

Tout s'efface dans le soir.
L'eau noire n'a rien conservé.
Et maintenant je marche
ployé par le vent
courbé par le temps
sans rien voir.

Et près du barrage,
là où un homme
fumait sa cigarette
à la même allure
que les nuages,

j'ai les yeux ouverts,
toujours plus ouverts.







jeudi 12 décembre 2019


Je regarde ce paysage
et je regarde aussi ma fatigue.

Qu'est-ce que je viens déposer là ?

C'est un mélange de suie collante
et de lourdeur.
Ce sont aussi mes os.
J'essaye de les regarder
comme on regarde
l'eau de la rivière
qui a emprisonné
la douceur du soir.

Mon corps, repose-toi
ou plutôt allège-toi,
là, maintenant
devant ce paysage qui te dit 
qui tu es vraiment.

Je dépose des mots inutiles,
des pensées qui ne pensent pas.

M'éveiller comme quelqu'un
qui dort profondément.



mardi 10 décembre 2019

Décidément tu ne veux pas
me quitter, petit nuage.
Et tu as mis ton costume de soirée.

Je pense aux maisons pimpantes
dans les villages perdus,
avec leur nom "Sam Suffit"
sur un écriteau d'ardoise.

Oui, Cela me suffit.
Ma soif de paix est si intense.
Quand j'écoute la radio
l’écœurement monte :
vomi de mots !

J'ai l'impression
que tu respires avec moi,
nuage poumon rose.

J'emplirai mon arche mentale
de cumulo-nimbus
et de stratus,

et tout en voguant
nous attendrons ensemble
la fin du déluge.




lundi 9 décembre 2019

Prends garde,
tiens-toi sur tes gardes.
la garde meurt mais 
ne se rend pas
Garde à vous !
Oh ! garde, garde, garde,
toutes ces chasses gardées !

Envie soudaine de baisser la garde,
d'ouvrir la fenêtre
de tirer le rideau,
de respirer.

Regarde,
il n'y a rien à garder.

Oh, s'abandonner,
seulement s'abandonner.






dimanche 8 décembre 2019


Y-a-t-il une parole
qui ne soit pas
prononcée
par une bouche d'homme ?

Ce ne serait pas des mots
mais ce serait
malgré tout 
une parole.

Ce serait une parole
imprononçable
mais malgré tout
une parole écoutée.

Ce serait un trésor,
une parole plus vraie
qu'une parole de mots
qui descendrait en chacun
accompagnée du silence.

Mais pour cela il faut descendre,
descendre toujours plus,
quitter les nuages et le ciel,
toucher la terre
et être réduit en poudre avec elle,

renaître
ensemencé par cette parole
qui ne se dit pas.







Vieux nomade (Asie centrale)

Dessin au fusain



samedi 7 décembre 2019




La lumière s'accroche
au chèvrefeuille.
Le buisson sauvage
s'enflamme un instant.

Cela ne sert à rien.
Cela va disparaître.

J'aurai pu
ne pas être là.

Je m'échine à quoi ?

Mais c'est comme cela.

C'est vraiment
pour ceux
qui me lisent.

Accroche-toi
aux étincelles pour rien
et qui vont disparaître.








-Rien-

Rien,
ni froidure,
ni frimas,

Rien,
ni verglas,
ni neige,

Rien,
Ni sécateur égaré
Ni jardinier distrait,

Rien,
Ni vent tempétueux,
Ni sécheresse impitoyable,

Rien n'empêchera
la rose de s'ouvrir !