Le hêtre pourpre
11 (dernière partie)
Plus de nuit
Il n'y a plus de
gris,
lumière pressentie.
La pluie d'automne
cache de l'or.
Mille histoires
se sont perdues
dans les remous
de la rivière.
Tant de vanité
parmi l'évidence
d'une rose dont
il ne restera
aucun atour !
Il n'y a plus de
nuit,
là où le poignard
s'est enfoncé,
où le poison
est devenu un
élixir,
et où le linceul
s'ouvre sur un océan
!
La chanson finit
bien
Dans le berceau
blanc
un enfant a les yeux
du ciel
et du vent frais à
la fenêtre.
En plein midi,
un homme s'égare
dans la forêt.
La nuit des branches
a caché les orées
!
Mais le soir venu,
au cœur de la
clairière,
un feu est allumé.
A la douceur de ses
flammes,
tous ceux qui
étaient là
se sont embrassés.
Ainsi se finit
une chanson d'amour
!
Leur ouvrage
Ils ont essayé,
ils essayent encore.
C'est le duvet
qui a le plus de
poids,
c'est le vide
qui reçoit les
échos,
c'est le nuage
qui prend toutes les
formes.
Ils ne prétendent
plus rien
que l'espace d'un
ciel
où le vent joue son
chemin.
Ils essayent
toujours,
glissent entre
les doigts du temps,
jouent parmi
des statues creuses
où se meurt
un rêve d'enfant !
Savoir ne suffit pas
Il n'y a plus
qu'à revenir
au premier mot
qui ne peut se dire,
puisque c'est lui
qui contient sans
peine
toutes les paroles.
Mais les paroles
s'envolent.
Il reste un mot
ouvert
privé d'oiseaux
fous,
et à l'intérieur
il n'y a plus
que du silence !
Enfin :
il était temps !
Le porteur
Porteur d'eau,
porteur de rêve,
donne une caresse
aux angles droits,
ouvre les murs
qui tiennent
les rivières en
prison.
Un jour ou l'autre
montera l'étoile
du désir d'orient.
Si la page est
obscure,
le livre est
flamboyant !
Parmi les cris
est la perle
du grands fonds
qui discrète
diffuse
le lait de sa
douceur !
Aborigène
Un aveugle chante
avec sa guitare.
Sa voix dans le noir
est oiseau d'argent.
Aucune cage
ne peut le retenir.
Quelques notes,
un coup d'aile,
et voilà l'océan
qui reprend sa
chanson.
Plus haut encore,
et c'est la terre
rouge
où il est né
qui l'appelle :
“Plus
de peur
pour mon enfant !”
Aurifère
Il a suffi
de l'alchimie
d'une nuit
pour que l'arbre
devienne de l'or.
Une autre nuit
encore,
il ouvrira les yeux
sur un monde
sans questions.
Les nuages
auront emmené
les dernières
heures
loin de l'arbre,
et il restera seul !
Tombé du ciel
Dahlia lotus rouge
aux pétales de
sang,
tombé d'on ne sait
quel bouquet
sur le trottoir,
fleur encore
toute fraîche,
il n'y a pas
d'autre message
que tenir ce joyau
entre les mains
et le poser au bord
d'une fenêtre grise
en s'enfuyant !
Tout est offert
Tout est offert,
ce sang qui court
dans l'arbre des
veines,
et le regard par où
le monde approche
et la caresse de
l'air
dans sa confiance
bleue,
tout est offert,
se laisser faire,
même l'ombre
est un appel
d'une matrice
de lumière,
la rose de l'automne
ôte l'angoisse
sans donner son
parfum,
et chaque grain de
raisin
sur la treille
est une prière,
tout est offert !
Espace parallèle
Pour se rejoindre,
il y a un autre
chemin
dans une forêt
d'enfance
où dire est
inutile.
Près des troncs
recouverts de
lichens,
l'esprit est aussi
vif
que l'eau claire
qui chante dans la
bruyère.
Les pas s'ornent du
silence
du sable rouge
et les pins cembro
au long cou
brossent avec calme
les derniers nuages
dans le ciel !
Lorsqu'on a la même
terre
pour se rejoindre,
il suffit d'un rêve
pur
et de la lumière
que l'on aime !
Création d'une
phrase
C'est en cet instant
dans la lumière
qui vient du Nord
avec le vent
emmenant
la brume de l'aube
et où les arbres
entonnent le chant
secret
de leurs robes
enflammées,
qu'il se penche
vers son cahier,
et note une phrase
que personne n'a
encore prononcée !
Prise de refuge
Feuilles d'automne
éparses dans la rue
grise de pluie
sont un signal
des contrées
blanches
où tout s'est
endormi.
La vigne se
recroqueville,
les arbres montrent
peu à peu leurs os
sombres
qui craquent dans
le vent d'hiver !
On prend refuge
au son d'une sonate
sous une lampe
soleil d'intérieur,
laissant l'esprit
avec les nuages
dessiner des formes
qui disparaissent
à chaque seconde !
Coup d’œil
Il vient de penser :
“Et
si c'était le monde
qui le regardait,
ces fumées
blanches,
ces arbres qui
changent
dans la patience
d'automne,
ces vitres noires,
ces montagnes qui
suivent
à l'horizon
le chemin du vent !”
Et en écho, il
entend :
“Toi,
où es-tu ?
Quel erreur y-a-t-il
en toi ,
et quand
s'apaisera-t-elle ?”
Tout devient si
tranquille.
Il se laisse
contempler
par les lueurs du
ciel !!
Chaque feuille
d'arbre
est devenue un œil !
Sans issue
L'impasse n'a pas
de murs.
On y entend
des chants d'oiseaux
qui confondent
l'aube et l'aurore.
Les sources
jaillissent
et disparaissent,
mais sont
sans chemin.
On est seul
à comprendre
qu'on ne comprendra
pas,
et que le vent
une fois de plus
effacera les mots
comme des traces de
pas !
Traversée
Cette
consolation
est sans remède,
elle est la porte,
la nuit sans fond
qui ne porte même
plus
la trace d'une
étoile.
Les mots sont du
sable,
le sablier reste
vide.
Cette consolation
ne s'écrit pas.
Elle est l'arbre
abattu,
avec le mystère
d'un surgeon,
la maison éventrée
où un homme
mystérieux
garde le feu à
l'âtre
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