lundi 29 mai 2023

 

Portrait du Poète Ilarie Voronca


Pastel sec


Nous sommes tous à attendre que l’on coupe nos liens.
Le travail doit bientôt être achevé. La souffrance
a été l’acide qui a brulé tout ce qui n’a pas été nous-mêmes
et nos traits se dessinent sur le cuivre de l’amertume,
les larmes ont dissous les frontières de nos yeux,
et nos faces qu’un souffle se tient prêt à disperser,
s’unissent aux forêts, aux plaines, aux nuages,
dans ce halo qui entoure les villes au bord de la mer.

Si nous avons été la citadelle assiégée, le monde
a été l’armée qui envahit déjà nos ruelles,
nous avons vite connu les limites de notre vie
comme la chèvre attachée qui n’a plus rien à brouter,
tout autour il y a le pré abondant de la mort,
notre corps était le compas dont les branches
s’écartent de plus en plus jusqu’à que le cercle
se confonde avec l’âme et devienne visible.

Il faudra qu’on coupe les liens pour comprendre
que nous n’avons pas à nous en aller et qu’ici même
où nous sommes à nous débattre est le miracle

nous verrons tout à coup les lumineux contours
qui étaient là depuis toujours à nous solliciter
nous serons comme la barque heureuse qui découvre
qu’autour d’elle est le lac serein, non pas la terre.

Il a fallu peiner et souffrir et pleurer
implorer la délivrance pour être enfin dignes
d’apprendre qu’ici même est l’endroit incomparable
où notre âme rayonne et se mêle au tout harmonieux. I. Voronca




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