dimanche 31 juillet 2022

 


Plus un bruit.
La prairie a un cœur.
Elle sait, elle devine.

Elle n'empêchera personne
de s'allonger.
Elle accueille.

Chaque brin d'herbe
montre une étoile
où l'on peut se perdre.

Elle aime les silencieux,
ceux qui n'ont plus rien à dire
et ceux qui n'ont plus peur.

La prairie connait
des mélodies secrètes.
Ne peuvent les écouter
que ceux qui préfèrent
être des fenêtres
plutôt que des diamants.











samedi 30 juillet 2022

 



Cette nuit, la sauterelle s'est invitée.
Elle a volé au dessus du lit.
On aurait dit
une chauve-souris.

Quand le matin est arrivé
elle ne trouvait plus la sortie.
Entre deux mains, elle s'est blottie

Et de la fenêtre grande ouverte
elle s'est envolée tout droit
sur la plus haute branche
du grand sapin voisin.

Au revoir sauterelle qui vole
presque aussi bien
que les hirondelles.




vendredi 29 juillet 2022

 

Sans retour,
souci sans soucis,
tu donnes tout.

Tu t'ouvres,
oublies même que tu t'ouvres,
souci au soleil.

En chacun de tes pétales,
la vie coule,
ne cherche pas à retenir.

D'où est venue cette peur, 
ces soucis qui rongent la vie ?
Etre une fleur.
Ouvrir les mains.

Le cœur a plus de pétales
qu'il n'ose croire.
La vie a plus de feu
qu'elle n'ose espérer,
plus d'amour qu'elle n'ose donner.

Se lever.
De l'extérieur aller
vers son cœur
le plus intérieur.

Une voix dira :
"Te voilà enfin !"

et la fleur s'ouvrira enfin,
comme le souci du jardin
qui donne tout.





jeudi 28 juillet 2022

 



-La rose-
La rose est sans pourquoi, fleurit parce qu'elle fleurit, 
N'a souci d'elle même, ne désire être vue.
Autres traductions : 
"La rose est sans pourquoi, elle fleurit parce qu'elle fleurit,
N'a pour elle même aucun soin, ne demande pas : Suis je regardée ?"

" La rose est sans pourquoi,
elle fleurit parce qu'elle fleurit,
elle ne se soucie pas d'elle-même,

elle ne se demande pas si on la voit."





 


Il était amoureux des mots
et pourtant les mots
pour lui n'étaient rien.

ou plutôt
les mots n'étaient pas assez,
comme le mot embrasser.

Partout il lisait
des messages
sans mots.

Il lisait sur les murs
dans les caniveaux,
au travers des fenêtres

Il lisait
sur les lèvres qui se ferment

Il lisait le pas qui titube
ou le pas qui conquiert

Il lisait l'oiseau fracassé
ou celui qui ose
à peine croire
à ses propres ailes.

Partout il lisait
la prison et les chaînes
à briser.

Il était amoureux des mots
mais les mots n'étaient pas assez
amoureux.

le mot feu, peut-être ?




Illustration de William Blake






mercredi 27 juillet 2022

 

Un instant,

l'homme a disparu.


Le cri des foulques,

la berceuse des feuillages,

quelques branches

qui craquent.


Plus une trace

d'homme.


Le regard , seul,

reste humain.


Il dépose

sur chaque herbe,

sur chaque arbre,

sur chaque oiseau

sa fragilité et sa tendresse.


Plus de séparation.

Il est bon d'être ensemble.







mardi 26 juillet 2022

 


Col relevé, silhouette un peu voûtée, cheveux en bataille, jambes frêles, corps un peu brisé, tu le vois disparaître dans l'impasse, un homme seul, mains dans les poches, un homme hagard que rien ne retient !
Quelques secondes, une silhouette fragile !. Mais tu as lu mystérieusement son histoire, ce qu'il a tant cherché, ce qu'il a tant désiré, ce qu'il a cru parfois trouver et qui maintenant est déjà loin. Et tu le vois marcher. Tu sais qu'il avance, qu'il ira au bout de ses forces. Tu sais aussi qu'il n'a pas peur de la mort. Il l'a traversé tant de fois ! Dans cette chute qui n'en finit pas, il a tellement embrassé la terre qu'elle est devenue sa compagne, sa sœur. Tu sais sans le connaître qu'il a du cœur, que peut-être il a nourri une souris qui lui tenait compagnie dans un appartement désert, qu'il a osé défendre un frère chassé avec brutalité de devant la vitrine d'un magasin de luxe! Tu sais qu'il a un trésor qu'il garde au fond de lui, qu'il continue les soirs clairs à regarder les étoiles, et qu'il aperçoit toujours celle qui brille le plus, qu'il se chuchote à lui-même :"Tu vois cette étoile, c'est la mienne !" Alors ce que les autres pensent de lui, vous pensez bien madame ! Il en a vraiment plus rien à faire. Et les chuchotis, les chuchotas, toutes ces médisances vipérines, il s'en contrebalance. Oui, ce matin, tu as croisé une ombre étrange, une ombre vagabonde un peu déglinguée, mais cette ombre irradiait un tel soleil ! Parce que vraiment, oui, tu en es sûr, il a choisi d'aimer sa vie, malgré sa peine. Dans cette impasse, il avançait un peu voûté, un peu tremblant, mais tu voyais bien que c'était comme le vol d'un goéland  que plus rien ne retient, qu'il avançait avec toute sa vie, qu'il emportait avec lui tous ceux qu'il aimait, qu'il s'offrait tout simplement, dans ce mouvement en avant. Oui, ce matin c'était peut-être plus qu'une ombre, un homme vu de dos qui s'enfonce dans une ruelle glaciale. C'était peut-être un messager qui te lançait un appel. Cette silhouette de rescapé est là devant toi. Tu pourrais la dessiner dans tous ses contours, avec chaque pli de ses vêtements, la silhouette qu'on retrouve à beaucoup de carrefours, la silhouette des affamés d'amour qui vont lentement rejoindre le soleil de leur royaume !

un texte de 2013

lundi 25 juillet 2022

 



C'est dans le vaste
que tu retrouves
ce vaste en toi

Pourquoi te dévaster ?

Tu te ramènes à toi,
sous un petit toit
où tu étouffes.

Ici, il n'y a pas 
de  petit toi.
tout étriqué.

Il y a le ciel
qui te respire

la prairie
qui t'élargit.

N'écoute pas
cette voix en toi
qui te dévaste
pour serrer à nouveau
les liens de la honte
et de la peur.



dimanche 24 juillet 2022

 



La vie sur un fil
au fil de la vie,

un pas après l'autre
entre ombre et lumière

Chacun est fragile,
Si mince est le fil.

La chute est facile
et elle fait mal.

Difficile de se relever, 
Terrible d'être brisé.

Mais une fois sur le fil
grâce à un sourire,
une main tendue
et de la vérité,

Le funambule avance
avec dans son cœur
ceux qui l'aiment
et ceux qu'il continue
à aimer.








samedi 23 juillet 2022

 




Déposer les armes

Ouvrir un mouchoir
qui a perdu le bleu du ciel :
quelques cailloux,
mais ils font mal.


La brise passe.
le mouchoir est devenu
blanc.


Entre les feuillages
la lumière connait, elle aussi,
d'autres chemins.


C'est elle qui les montre,
alors que l'on ne voit plus rien.


Délicatesse,
Poser la tête
sur un oreiller de pétales.


Libre, vraiment libre,
Ne plus bouger.
On est porté dans une allée
où tout embaume.


Rien ne presse.

C'est l'heure tant désirée
d'un vrai repos,
eau si calme de l'étang.


Les pierres sont au fond maintenant.
Les rides sur l'eau s'effacent.


Ne pas s'éloigner.
Ne pas s'écarter.

Cette brise ouvre des portes,
mais ne les referme jamais.








jeudi 21 juillet 2022

 



Sous l'eau,
sur l'eau,
ils glissent.

gracieux canard,
grâcieux poisson
qui ont épousé l'eau,

le secret de votre aisance
est d'être ce que vous êtes
sans rien y ajouter.

Alors, au fil de l'onde
vous glissez.

L'homme, lui,
a bien du mal à nager.

Et s'il y arrive
il nage souvent
à contre-courant,

ne voyant pas l'océan
qui l'attend
au bout de la rivière.








mercredi 20 juillet 2022

 



Laisse toi silencieusement attirer

par la force de ce que tu aimes réellement.

Rûmi



L'aube était 
comme un appel
malgré la touffeur.

Et cet appel
était clair,
sans appel.

C'était comme 
celui de l'enfance
où par la grâce d'un refrain
était révélé
que la seule issue
était intérieure

et que jamais ce monde
ne comble un cœur
assoiffé d'infini













mardi 19 juillet 2022




Tenir sans tenir,
Monter sans monter,
Aimer détacher, évider
sans être vide,

Brûler sans brûlure,
Vivre vrai,

Se relever et sourire,
Revenir sans retour,
Implorer toujours,

Avancer sans devancer,
Comprendre sans un mot,
Avoir cœur ouvert 
à toutes les aubes,

Attendre sans attendre,
se reposer enfin.







 

lundi 18 juillet 2022

 


"La violoniste au vent."

Pastel sec





 


Portrait de "Marie"
d'après un tableau de Léonard de Vinci


Toute en dedans,
Marie simple
et sans déchirure,
Marie sans plis
et sans ruse,

Marie mère
dont les bras n'étouffent pas
mais rassurent,

toi qui accueille
l'à-venir
des enfants blessés
et reste aveugle
à la nuit sans étoile
de leur passé

Marie toute en dedans
de l'éternel présent,
je te salue.





dimanche 17 juillet 2022

 




Portrait du poète René Daumal

Pastel sec.


«Je veux vivre toujours d'une vie plus réelle, en rejetant dans le monde tout ce qui me limite, et dont je fais aussitôt une Existence, une Matière, un Objet de connaissance. Comme cette négation s'opère dans la durée irréversible, ce que je rejette hors de moi, je le rejette aussi dans le passé. Ainsi, je ne suis véritablement que dans l'acte de négation et dans l'instant. Ma conscience se cherche éternelle dans chaque instant de la durée, en tuant ses enveloppes successives, qui deviennent matière. Je vais vers un avenir qui n'existe pas, laissant derrière moi à chaque instant un nouveau cadavre.»

René Daumal



 


Le puits est profond,
mais comme le soir qui frémit,
la source est toute proche.

Une corde de larmes
est prête pour 
remonter l'eau vive.

Alors d'autres profondeurs apparaîtront
et étrangement les ténèbres
auront des reflets d'or.

On sera vivant
comme un parfum qui se diffuse
et donne envie de respirer
à pleins poumons.





samedi 16 juillet 2022

 

Cœur à cœur.
Plus rien n'existe
que ce flux
d'un cœur
à un autre cœur.

Cœur vivant,
vivante pulsation
hors du temps,
de l'espace

Se perdre
sans peur
et se retrouver
en vie,

d'une vie
plus vivante.









vendredi 15 juillet 2022

 



Avec les fleurs de bignone
on peut faire
des doigts de sorcière.

Une fleur renversée
à chaque doigt.

Mais après,
les fleurs fanent.
Les sorcières
tombent en poussière.

Alors c'est aussi bien
de ne rien faire.




jeudi 14 juillet 2022

 

L'étang se fige sous la chaleur,
les mots aussi.

Seuls les foulques
poussent des cris
aussi secs que l'air.





mercredi 13 juillet 2022

 


Marche à couvert
le long du ruisseau de l'Asnée.
Le bruit de l'eau
suffit pour ne pas penser.

Et dans la prairie
un parterre de fleurs
qui sont sur le point 
de faner rappelle
que tout est éphémère.

Alors qu'est-ce qu'il reste ?

Les éclats de vie
sont parfois bien acérés.

Reste la pauvreté,
traversé par
le chant d'un ruisseau.

Encore tant de moments
à serrer contre son cœur.

Encore tant de moments
pour être transpercé

et marcher pantelant.






mardi 12 juillet 2022

 




Six heure trente
La lune se cache.
Le ciel se plisse

En levant les yeux
on se sent dépassé.

On est planté là
dans ce vaste.

Et l'on oublie
où l'on est.

Un oiseau pousse une note
et invite à la danse.

Six heures trente.
Le vent s'est levé
l'oiseau s'est tu,

et la vie continue











lundi 11 juillet 2022

 


Voir et aussi bien
ne plus voir
comme 
on ne saisit plus rien.

Voir et n'être rien
dans ce voir.








dimanche 10 juillet 2022

 


Au bord de la rivière
un arbre dans toute sa grâce danse.
Il se couvre d'une lumière
qui est plus
que celle du soleil.

Avec la symphonie du ciel
du vent, de l'eau et des roseaux
il est en harmonie.

Et l'on voudrait être seul ?

N'est-on pas tissé
des éléments de l'univers,
du sourire d'une inconnue,
d'une musique douce
au creux de l' oreille ?