vendredi 14 novembre 2025

 

Marcher écrire. Un pas, un mot. Un livre pris, aussitôt reposé, je suis où ? Marcher écrire. Se dire à soi-même une parole qui tient la route, qui tient l'âme. Nager dans la houle de la parole, retrouver le fil. Le minotaure ne mangera personne. 

Marcher écrire. Je ne suis pas seul. Des milliers de fenêtres s'allument. Retour d'école, chocolat chaud. Qu'est-ce que j'ai à tenir ? Je ferme les yeux et je vois la rivière. Elle me rassure. Qui tiendrait, retiendrait une rivière ? Elle coule. Elle commence par la tête, s'enroule autour du cœur, puis s'apaise dans le ventre. Je me lève. Je fais un bout de chemin avec elle, compagne rivière, chevelure d'eau qui enlève le nœud de l'angoisse. 

Marcher écrire, si rien ne marche, si l'on ne sait rien de l'avenir. 

Marcher écrire ayant quitté son armure. Je suis un arbre nu qui marche et qui va passer à la râpe de l'hiver. Je ne veux pas qu'on fasse des projets pour moi. Je ne veux pas qu'on me dise : "il n'y a qu'une route et c'est celle-là !" 

Marcher écrire. Il n' y a pas de menace. Seul celui qui a été une mort pour lui-même le sait bien.

 Marcher bâtir. Apporter une pierre. Je la regarde. Je la parcours des mains. Elle a du poids, cette pierre arrachée au néant. Elle devient pierre d'une demeure qui n'est pas une demeure d'emprunt. 

Marcher écrire. sans chercher de but à atteindre ou de fin des temps. Je ne veux plus avoir peur de la nuit. Je marche en tressaillant. J'ai des lueurs à partager. On ne peut guère me demander autre chose. 

Marcher écrire





jeudi 13 novembre 2025

 


Et si c'était la dernière fois
que des yeux s'ouvraient
sur les ors de l'automne,
quel regret soudain
ne naitrait-il pas
de n'avoir su voir
plus profondément
les êtres et les choses ?

Plus profondément
mais toujours amoureusement
comme si tout l'univers
n'était que le signe d'un appel
à n'être que tendresse.

Alors allant par les rues
les prés et les forêts
le regard déposerait
sa caresse aussi doucement
que l'on souffle sur un feu
qui va mourir,

braises rougeoyantes,
flamme qui jaillirait
commencerait à danser,

et tout s'éclairerait.

l'étreinte serait dans le cœur
à chaque instant,
tous les êtres et les choses
enfin réunis.






mercredi 12 novembre 2025

 

Battement d'ailes.
Envol rapide
pour s'abriter 
dans le feuillage.

Une délicate colombe
semble venir d'un autre monde
dans cette rue
bruyante et surchargée
de voitures.

Deux mondes
au même endroit.

Vision comme un rappel
qu'au milieu du tumulte
la paix peut régner,
refuge en soi-même
avec la douceur de l'oiseau,
sa candeur

Ne manquait plus
qu'une fontaine
où la colombe
aurait pu
se désaltérer.







mardi 11 novembre 2025


Un peu de lumière
au sommet d'un grand arbre,
sur le faîte d'un nuage,
et tout est transformé.

Brèves apparitions.
Trouées soudaines
dans l'ordinaire.

Le regard se désencombre
des vols habituels
d'oiseaux noirs,
pensées aussi fugaces,
cordes enchevêtrées.

Cela apparait soudainement
dans un espace
 où toute rumination
s'est tue
Le voile est ôté.

Vraie réalité.
Nul besoin d'autre chose
puisqu'il y a accord.

Transporter ce trésor en soi,
flamme tremblante
d'une chandelle que
protège une main.

Car toujours rôde en soi
la face étrange d'un soleil noir
qui veut prendre
et ne jamais rien donner.








 

lundi 10 novembre 2025

 



Une feuille qui sort
de son bain d'or
est là aux pieds
du promeneur

Elle lui fait signe
en attendant
des jours meilleurs.

l'or demeure
malgré la pourriture
qui ronge peu à peu
sa matière.

Il n'y a aucune raison
de croire que l'obscurité
précède la lumière.

Traverser la nuit
avec des feuilles d'or
à ses pieds

Accroché à cette lumière
 des sages nous disent
que l'on est 
au moment de la mort
comme un cheveu sorti du lait
au lieu d'être un coton
prisonnier des épines.





dimanche 9 novembre 2025

 

Tout était clair
le long du canal.
La vie s'invitait,
précise, délicate.

C'est comme si le soleil
ce matin là
avait eu la vertu
de tout nettoyer.

Un grand coup de chiffon
sur la myopie qu'engendrent
les pensées néfastes.

Il y avait un pigeon âgé
prêt à dialoguer,
un vieil homme un peu voûté
qui regardait son chien frétiller,
une dame en chaise roulante
qui prenait le soleil
comme d'autres
 prennent un médicament.

Voir soudainement clair
précisément clair.

La vie s'invitait
à chaque respiration.

On aurait pu s'effacer.
La vie, elle, serait restée,
précise, délicate.





samedi 8 novembre 2025

 


Etre revenu et revenir encore.

D'où revenir?

Etre revenu de ce qui passe
inexorablement,
de ce qui doit disparaître
inéluctablement.

Et où revenir ?

Revenir à ce qui ne meurt pas,
ne peut pas mourir.
Les feuilles mortes
jonchent l'étang
et les allées qui l'entourent.

Trainer des pieds
dans les pensées mortes,
et désirer ce qui ne meurt pas
ne peut pas mourir.